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En Libye, la tentation d’une restauration monarchique.


Petit fils d’Idris Ier renversé par le colonel Kadhafi en 1969, l’émir Mohammed Reda Senoussi est appelé à la rescousse par une partie de la classe politique libyenne. Le prince héritier en exil se voit déjà jouer un rôle de pacificateur dans un pays déchiré entre les milices. Mais le risque d’instrumentalisation n’est pas loin.

 

Dans ses déclarations, l'héritier du trône libyen se pose en pacificateur, cherchant à réinstaurer un dialogue national "qui sauvera notre pays du fléau des guerres, de la discorde et de la division". "Notre objectif commun est de sauver notre pays et œuvrer à construire un État basé sur les institutions et le droit".

 

Alors que la monarchie a été abolie il y a plus d’un demi-siècle, une partie de la classe politique espère ce retour du prince aux affaires du pays. Un plébiscite qui a lieu sur fond d’impasse politique. La Libye vit toujours déchirée entre deux autorités rivales qui se disputent le pouvoir, avec, d’un côté, le gouvernement de Tripoli reconnu par l’ONU, et de l’autre, l’est du pays, sous le contrôle des forces du maréchal Haftar.

 

Des rumeurs sur sa venue prochaine en Libye à l'invitation du Premier ministre de l’autorité de Tripoli, Abdelhamid Dbeibah, ont été démenties par la famille royale, qui a affirmé que l'homme politique et son entourage "cherchent à exploiter les progrès réalisés par Son Altesse Royale dans le cadre du dialogue national en cours".

 

Jalel Harchaoui, spécialiste de la Libye et chercheur associé au Royal United Services Institute de Londres, a déjà rencontré le prince héritier, qui vit dans la capitale britannique. « C’est un homme intelligent, très accessible, qui a une conscience de son pays. Il est assez ancré dans la réalité pour quelqu'un qui est en exil depuis des décennies. Il voudrait – c’est ce qu’il dit en tout cas – contribuer positivement à la version 2024 de son pays. »

 

Mais un retour politique du prince héritier laisse cet expert sceptique : « Le symbolisme, la popularité et l’héritage historique ne suffisent pas. » Jalel Harchaoui avertit sur l’utilisation politique d’un souverain qui pourrait être utilisé comme un « gadget ».

 

Selon lui, il est illusoire d’imaginer que l’émir pourrait rester une figure « neutre » symbolisant l’unité du pays, sans attache à aucune milice locale. « Il dispose d’un capital politique qu’il va tout de suite consumer, dès qu’il mettra le pied en Libye où il va devoir demander la protection physique d’une faction. » Toutes les factions espèrent son retour « car tous souhaitent l’instrumentaliser », poursuit le chercheur, qui affirme que les groupes armés libyens « le contactent depuis des années ».

 

Mais pour Jalel Harchaoui, l’émir pourrait avoir un rôle plus intéressant à jouer s’il met son retour dans la balance auprès de la classe politique libyenne pour les pousser à avancer sur l’adoption d’une nouvelle Constitution.




Texte © Bahar Makooi, France 24

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